Sur la route, il tombe sous le sens que piéton, cycliste et automobiliste doivent se responsabiliser face à autrui. Certains jours toutefois, je me demande jusqu’où notre insouciance collective nous mènera. À force d’enfreindre les règlements de la circulation et d’agir comme si la rue nous appartenait, nous sommes tous à rejeter la faute sur autrui.
Certes, les cyclistes qui ne respectent pas le Code de la sécurité routière sont aussi fautifs que les automobilistes, à cette différence près que les cyclistes insouciants — contrairement aux automobilistes insouciants — ne mettent pas la vie des autres en danger ou enfin très rarement, comme les statistiques le démontrent. D’où l’importance de rappeler la pertinence du principe de prudence, qui veut que le plus lourd et le plus rapide doit faire preuve, pour des raisons évidentes, d’une prudence accrue envers les usagers les plus vulnérables.
Il existe dans le Code de la sécurité routière du Québec l’article 327 qui prohibe toute vitesse ou toute action susceptible de mettre en péril la vie ou la sécurité des personnes ou la propriété. On est donc en droit de se demander pourquoi les policiers appliquent rarement ce règlement lors d’accidents graves impliquant des cyclistes et des automobilistes – et plus particulièrement lorsque ceux-ci ont mis en péril la vie ou la sécurité des cyclistes. Récemment, la journaliste Isabelle Richer a été fauchée par un automobiliste qui a eu manifestement un comportement dangereux — il a dépassé un véhicule de ferme dans un rang sans tenir compte de l’arrivée de deux cyclistes en sens inverse. Pourtant, à ma connaissance, l’automobiliste n’a reçu aucune sanction. Il y a de quoi en perdre les pédales quand on se rappelle que l’an dernier la Cour supérieure du Québec a condamné un cycliste de Longueuil à 1000 $ d’amende pour une conduite « mettant en péril la sécurité ou la vie des personnes »… alors que celui-ci avait grillé un feu rouge, sans heurter personne!
Nous croyons qu’il faut profiter de la réforme du Code de la sécurité routière pour reconnaître collectivement le principe de prudence sur la route. Car il y a une marge entre l’erreur de bonne foi et la manœuvre dangereuse. Un automobiliste qui double un cycliste sans lui laisser l’espace nécessaire effectue une manœuvre dangereuse dont, le plus souvent, le cycliste fait les frais. Il est temps que cela change et que chacun assume sa responsabilité lorsqu’il conduit un véhicule. L’époque du « je ne l’avais pas vu » est révolue.
Suzanne Lareau
Présidente-directrice générale